Genèse Ma'ohi
écrit pour le magazine à bord de la Cie aérienne Air Tahiti
Le monde Polynésien ou Te Ao Ma'ohi divisé en cinq archipels se décline en autant de versions de la Genèse. Certains îles ont elles-mêmes leur propres versions.
Je ne retiendrai ici que deux versions, celle de Hao, Tuamotu, île natale et ancestrale de ma grand-mère maternelle, et celle des îles de la Société d'où vient ma grand-mère paternelle.
Durant une grande partie de ma vie, j'ignorais tout de la Genèse de mon pays telle qu'elle fut connue de mes ancêtres.
J'avais entendu parler de Ta'aroa qui semblait être le dieu le plus important. Je savais que les tiki devaient être respectés car ils font partie des cultes anciens. Les marae me faisaient peur car des sacrifices humains étaient attachés à leur Histoire.
En grandissant au sein de mes familles Ma'ohi, j'ai appris que tout est habité et vivant, même le monde inerte, les pierres, les arbres, l'eau, les vents, les animaux et même les terres, les lieux.
Je n'ai pas tout de suite compris que mon univers entier était sacré.
Était- ce dû au fait que l'éducation d'après-guerre d'un monde occidental qui se remettait de ses cendres enseignait que la nature devait être domptée et dominée par la main de l'homme ? Cette éducation qui nous amenait à considérer la nature comme un ennemi désacralisait notre environnement.
Comme tous les enfants de Polynésie j'ai reçu également une éducation religieuse chrétienne qui nous entraînait non seulement à craindre toute approche spirituelle Ma'ohi, mais surtout à l'ignorer délibérément.
Puis le besoin de connaître la spiritualité de mes ancêtres me prit. Je dévorais plusieurs livres sur le sujet.
Était- ce dû au fait que l'éducation d'après-guerre d'un monde occidental qui se remettait de ses cendres enseignait que la nature devait être domptée et dominée par la main de l'homme ? Cette éducation qui nous amenait à considérer la nature comme un ennemi désacralisait notre environnement.
Comme tous les enfants de Polynésie j'ai reçu également une éducation religieuse chrétienne qui nous entraînait non seulement à craindre toute approche spirituelle Ma'ohi, mais surtout à l'ignorer délibérément.
Puis le besoin de connaître la spiritualité de mes ancêtres me prit. Je dévorais plusieurs livres sur le sujet.
Les trois premiers m'interpellèrent fortement :Le Journal de James Morrisson , second maître à bord de la Bounty, le livre d'Eugène Caillot intitulé Mythes, Légendes et Traditions des Polynésiens, publié en 1914, et Tahiti aux Temps Anciens de Teuira Henry.
Dans la deuxième partie de son Journal, James Morrison décrit l'île de Tahiti ainsi que les mœurs des insulaires.
Dans le passage intitulé « Religion » Morrison écrit : « Leur religion est sans forme précise, et bien qu'à certains égards leur étant particulière, elle pourrait par certains côtés être comparée à celle de certaines tribus juives antiques. Leurs traditions nombreuses peuvent y être comparées et correspondent à nos livres de l'Ancien Testament. Ils possèdent des images mais ne les adorent pas. Leurs divinités sont au nombre de trois. On les appelle du nom général de Atua mais elles sont adorées séparément.
Il s'agit de Tane, le premier ou père des dieux appelé quelques fois Atea Nui, Grand Dieu, et quelques fois Atua Muna, Dieu immense ou effrayant, créateur du monde et de toutes choses, du jour et de la nuit, du tonnerre, des éclairs, de la pluie, etc...
Oromatua ou le fils est celui qui préside à la guerre et à la paix et qui punit les chefs de maladie ou de mort lorsqu'ils négligent leurs fonctions.
Tipahoamanu est le hoa ou ami des deux précédents et leur messager sur terre. »
Morrison rapporte que le soleil et la lune sont le père et la mère des étoiles. Une éclipse est le signe qu'elles sont en train de s'unir. Toutes choses sur terre sont produites ainsi, tout ce qui est créé se désagrège, disparaît tandis que de nouvelles choses prennent leur place, tout le système de la nature étant un changement permanent. Les rivières vont à la mer, les arbres pourrissent, les rochers tombent des montagnes. C'est ainsi depuis la création de la terre et sans diminution, puisque tout se remplace. Les Maohi connaissaient l'impermanence.
Morrison rapporte que le soleil et la lune sont le père et la mère des étoiles. Une éclipse est le signe qu'elles sont en train de s'unir. Toutes choses sur terre sont produites ainsi, tout ce qui est créé se désagrège, disparaît tandis que de nouvelles choses prennent leur place, tout le système de la nature étant un changement permanent. Les rivières vont à la mer, les arbres pourrissent, les rochers tombent des montagnes. C'est ainsi depuis la création de la terre et sans diminution, puisque tout se remplace. Les Maohi connaissaient l'impermanence.
Munanui
le roi géant de Haoragai
Quelle ne fut ma surprise à la lecture de la Création selon la tradition de Hao, île des Tuamotu, de la tribu des Parata, de pouvoir la comparer au récit biblique.
Le recueil d'Eugène Caillot s'ouvre sur le récit des ancêtres de Hao, littérature orale transmise de génération en génération.
« Nous avons trois dieux : Vateanukumauatua, Tane et Tagaroa.
C'est Vatea qui a fait la terre et le ciel et toutes les choses qui s'y trouvent.
Vatea a fait la terre plate, le ciel y était adhérent. Tane l'a soulevé, et Tagaroa l'a maintenu éloigné.
Le nom de la terre était Hawaiki .
Quand la terre a été finie, il a fait l'homme, appelé Tiki, et sa femme , Hina.
Ils ont couché ensemble et ils ont eu des enfants. »
Plus loin sont évoqués le déluge, la pirogue de Rata qui devait abriter sa femme, leurs trois fils et leurs épouses, puis la clôture de Maragai, équivalent de la tour de Babel où les langues seront multipliées.
La Genèse selon les ancêtres de Hao raconte que le célèbre, redoutable mais très aimé roi Munanui fut créé en même temps que son île.
Au moment où la terre Haoroagi a été faite, est né le roi Munanui.
C'était un géant qui ne se battait avec d'autres armes que ses énormes mains avec lesquelles il prenait quatre hommes à la fois et les déchirait.
Il n'y eut pas d'autres rois après lui ; il y a eu de grands guerriers à Hao, mais ils n'ont jamais été rois.
Bien longtemps après Munanui est né un ariki, Tuohea, qui allait devenir grand-chef du sud de Hao.
Né avec quatre yeux, ses parents, épouvantés, l'abandonnèrent. Il fut élevé par les mauvais esprits qui habitaient le sud de l'île.
Dans ces écrits des temps premiers de la création du monde selon Hao, nous ne pouvons que nous laisser emporter par la dimension poétique du récit pourtant cruel et insupportable.
Ainsi, le Ariki Tuohea avait pour vêtements « la pluie, la mer, le vent, le soleil... ».
Il se présente ainsi : « Moi, je suis le roi du côté sud, mes gens sont les mauvais esprits, mes résidences sont Onikau et Opokara, sous terre, où je suis tous les jours... je dors dans le lagon sur des cailloux. Je n'ai ni froid ni mal, mais tout le temps pendant que je me repose, j'ai deux yeux qui dorment et deux yeux qui veillent ».
Alors qu'il se meurt, il dit encore : « c'est moi le roi Tuohea, le roi du grand sud , du sud où il n'y a pas d'arbres, où il n'y a qu'un récif : mes vêtements sont la pluie, le vent, le soleil, mes quatre yeux regardent en haut, en bas, et je vois trouble maintenant, je meurs à Opokara . »
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