Genèse Ma'ohi
Part 4
Munanui
le roi géant de Haoragai
Quelle ne fut ma surprise à la
lecture de la Création selon la tradition de Hao, île des Tuamotu,
de la tribu des Parata, de pouvoir la comparer au récit biblique.
Le recueil d'Eugène Caillot
s'ouvre sur le récit des ancêtres de Hao, littérature orale
transmise de génération en génération.
« Nous avons trois dieux :
Vateanukumauatua, Tane et Tagaroa.
C'est Vatea qui a fait la terre
et le ciel et toutes les choses qui s'y trouvent.
Vatea a fait la terre plate, le
ciel y était adhérent. Tane l'a soulevé, et Tagaroa l'a maintenu
éloigné.
Le nom de la terre était
Hawaiki .
Quand la terre a été finie, il
a fait l'homme, appelé Tiki, et sa femme , Hina.
Ils ont couché ensemble et ils
ont eu des enfants. »
Plus loin sont évoqués le
déluge, la pirogue de Rata qui devait abriter sa femme, leurs trois
fils et leurs épouses, puis la clôture de Maragai, équivalent de
la tour de Babel où les langues seront multipliées.
La Genèse selon les ancêtres
de Hao raconte que le célèbre, redoutable mais très aimé roi
Munanui fut créé en même temps que son île.
Au moment où
la terre Haoroagi a été faite, est né le roi Munanui.
C'était
un géant qui ne se battait avec d'autres armes que ses énormes
mains avec lesquelles il prenait quatre hommes à la fois et les
déchirait.
Il n'y eut pas d'autres rois après lui ; il y a eu
de grands guerriers à Hao, mais ils n'ont jamais été rois.
Bien longtemps après Munanui
est né un ariki, Tuohea, qui allait devenir grand-chef du sud
de Hao.
Né avec quatre yeux, ses parents, épouvantés,
l'abandonnèrent. Il fut élevé par les mauvais esprits qui
habitaient le sud de l'île.
Dans ces écrits des temps
premiers de la création du monde selon Hao, nous ne pouvons que nous
laisser emporter par la dimension poétique du récit pourtant cruel
et insupportable.
Ainsi, le Ariki Tuohea avait
pour vêtements « la pluie, la mer, le vent, le soleil... ».
Il se présente ainsi : « Moi, je suis le roi du côté
sud, mes gens sont les mauvais esprits, mes résidences sont Onikau
et Opokara, sous terre, où je suis tous les jours... je dors dans le
lagon sur des cailloux. Je n'ai ni froid ni mal, mais tout le temps
pendant que je me repose, j'ai deux yeux qui dorment et deux yeux qui
veillent ».
Alors qu'il se meurt, il dit
encore : « c'est moi le roi Tuohea, le roi du grand sud ,
du sud où il n'y a pas d'arbres, où il n'y a qu'un récif :
mes vêtements sont la pluie, le vent, le soleil, mes quatre yeux
regardent en haut, en bas, et je vois trouble maintenant, je meurs à
Opokara . »